Une pièce de Zad Moultaka.
Interprétée par L’Ensemble Musicatreize & L’Ensemble Mezwej.
Direction Roland Hayrabedian.
L’autre rive est une pièce du compositeur Libanais Zad Moultaka. Elle tient sa singularité du fait qu’elle se définit aussi comme une œuvre écrite pour « l’espace des lieux ». Dans la version concert, les douze mouvements de L’autre rive sont joués simultanément dans deux espaces différents mais contigus, permettant une sorte de porosité sonore, comme deux univers jumeaux vivant fermés l’un à l’autre, dans une vague conscience l’un de l’autre. A l’entracte, le public est invité à changer de lieu et à vivre l’expérience dans l’autre sens. L’autre rive expérimente ainsi les empreintes de la séparation, en une sorte de rituel de passage, linéaire.
L’œuvre musicale est ici détachée de sa situation traditionnelle d’interprétation et d’écoute que constitue le moment du concert. Grâce a des techniques d’enregistrement innovantes, elle est remise en jeu et prolongée dans une forme de relation nouvelle a l’écoute : celle d’une installation interactive multi-sensorielle et immersive. L’auditeur peut ainsi vivre une expérience inaccessible en situation de concert : se déplacer dans l’espace et donc éprouver la complexité et la richesse de la relation entre le lieu et la musique.
L’auditeur pénètre dans la salle. Des sons confus et lointains, palabres d’une foule animée, égrenées dans tout le lieu, émergent dès l’entrée. Un espace lumineux, d’un blanc cru et presque éblouissant, semble indiquer le cœur de l’installation, et donc la direction à suivre. À l’approche de cette zone, les contours d’un grand volant se dessinent. C’est depuis ce pupitre de contrôle, point de départ et épicentre de l’expérience d’écoute, qu’il est proposé au visiteur d’explorer l’œuvre musicale. Dès que celui-ci actionne le volant, l’état lumineux change et se teinte d’une couleur vive, primaire, qui marque et délimite la zone. Puis une étrange image apparaît sur l’écran circulaire suspendu. Et enfin, la musique se déploie et inonde l’espace.
L’installation est activée et contrôlée par un seul visiteur-auditeur, qui manipule le volant, depuis le centre de ce grand cube coloré, tel un chef d’orchestre ou le capitaine d’un navire. Le public peut déambuler autour de ce point central, et donc éprouver une écoute à l’intérieur ou à l’extérieur du dispositif de projection. Ce volant, qui offre une certaine résistance au mouvement, est équipé d’un pommeau, pour accompagner les mouvements et indiquer la position sur le cadran. Le volant bloque sur sa position "basse", et nous verrons par la suite la symbolique liée à cette impossibilité de clore le cercle par cette position.
Chaque position du volant correspond à une combinaison particulière entre l’espace sonore entendu (proximité ou éloignement des sources, type de diffusion), l’image projetée sur l’écran et la couleur diffusée en salle. En tournant le volant, le visiteur-auditeur circule entre ces différentes zones et explore ces différentes relations.
Une installation du GMEA - Centre National de Création Musicale d’Albi-Tarn
Proposition : Thierry Besche
Conception et réalisation sonore : Benjamin Maumus & Julien Rabin.
Fabrication : Pol Pérez
www.ladepeche.fr/article/2015/06/05/2118490-nuit-pastel-le-public-capitaine-du-navire.html